Retrouvez-nous sur Facebook et n'hésitez pas à nous joindre par mail

 

Sur le sujet acouphènes, hyperacousie et médecine comportementale, on peut lire sur la toile des appréciations relatant des faits qui sont incompatibles avec les fondements mêmes de la pratique de médecine comportementale que les auteurs prétendent commenter.
Ce qui est affirmé correspond à une méconnaissance du sujet qui devrait inciter ces personnes à un minimum de retenue.

La médecine comportementale : une discipline exigeante.

La médecine comportementale vise à :

  • Préserver la qualité de vie.
  • Eviter l’apparition de certains symptômes.
  • Eviter l’apparition de certaines maladies.
  • Eviter l’aggravation de certaines maladies ou symptômes.

La médecine comportementale améliore :

  • La réponse aux troubles aigus.
  • L’adaptation.

La médecine comportementale est une pratique contraignante pour le praticien comme pour le patient :
Le patient collabore avec le praticien à la mise en œuvre et à l’évaluation de la thérapie.

Le praticien fonde sa démarche sur l’empathie sans laquelle il ne peut pas être un partenaire crédible pour le patient.

Le praticien doit :

  • Avoir une connaissance approfondie du fonctionnement cérébral.
  • Avoir appris les relations réciproques du corps et de l’esprit.
  • Savoir transmettre ces savoirs.
  • Savoir transmettre les savoir-faire pour modifier des comportements.
  • Connaître les processus à l’origine du comportement qu’il cherche à influencer.
  • Connaître les processus à l’origine de l’impact des changements qu’il provoque.
  • Savoir qu’il agit surtout sur la qualité de vie.
  • Savoir les limites dans lesquelles il peut agir sur ce qui trouble la qualité de vie.
  • Lorsque ce qui trouble la qualité de vie est une maladie ou un symptôme, actualiser régulièrement la connaissance la plus pointue possible du sujet.

La médecine comportementale :

  • Est caractérisée par une démarche fondée sur des évaluations rigoureuses et répétées par des experts indépendants reconnus par les instances scientifiques internationales.
  • Répond aux critères de « médecine basée sur des preuves ».
  • Est pratiquée par des professionnels aux qualifications officielles.
  • N’est pas une « médecine parallèle ».

Si la description d’une pratique ne répond pas à ces critères :

  • La description en question est une fiction (on raconte n’importe quoi avec un air savant !)
  • Ou ce n’est pas de la médecine comportementale.

Lara Fabian : un symbole pour l’hyperacousie.

Un internaute a pris la situation qu’il affirme avoir été celle d’une personnalité célèbre pour laisser entendre qu’on ne sort pas de l’hyperacousie. Ce qui est pris pour critère de gravité est le fait que la victime n’aurait même plus supporté la voix de sa petite fille. Cette situation est certainement très pénible, d’autant qu’il serait question de Lara Fabian … dont on connaît la puissance vocale et les décibels auxquels elle se confronte.

Pour ne pas entretenir le désespoir des personnes souffrant d’hyperacousie, il serait judicieux d’actualiser le propos, puisque Lara Fabian a donné des concerts ces dernières années et donne des concerts prochainement :
• : 16 Mars au Colisée de Roubaix
• : 19 Mars au Forum de Liège
• : 22 Mars au Sislo de Marseille
• : 25 Mars au Vinci de Tours
• : 3 Juin au Palais des Congrès de Paris
• : 4 Juin à l’amphithéatre de Lyon

Si Lara Fabian a souffert ou souffre d’hyperacousie, elle n’en souffre plus ou en souffre suffisamment moins pour pouvoir exercer ce métier où la pression sonore est forte. On ne reste pas obligatoirement dans la souffrance hyperacousique : voilà, pour nous, en médecine comportementale, le message le plus important. Comment on sort de la souffrance hyperacousique est l’autre aspect important et c’est de l’ordre du savoir-faire de la médecine comportementale.

Ecrire tout et son contraire pour dénigrer nommément un médecin.

Il est écrit quelque part sur la toile que les résultats déclarés par la médecine comportementale en matière d’intolérance à l’acouphène et d’hyperacousie ne sont pas crédibles puisque « personne n’en parle ». Et, émanant peut-être du même auteur, que si « Rien n’est fait pour chercher un traitement ou une thérapie » pour ces affections c’est parce que les professionnels se réfèrent à l’approche comportementale.

On peut lire aussi : « il faut bien reconnaître que les américains sont discrets depuis 30 ans à ce sujet à la lecture des forums américains». Le sujet de ce propos est l’efficacité de la médecine comportementale à l’égard de l’intolérance à l’acouphène et de l’hyperacousie. Et, un peu plus loin : « On ne peut accorder aucune crédibilité aux « témoignages » des forums ». Il est vrai que l’auteur parle alors des forums français …

On pourrait se demander qui sont les « menteurs, et les baratineurs éhontés et sans scrupules face à la souffrance des malades », décrits par l’auteur du dénigrement, qui se cachent derrière l’anonymat de la toile pour chercher à discréditer nommément un médecin avec force contradictions.

La part de psychologie dans l’intolérance à l’acouphène et l’hyperacousie

Sans entrer dans les détails qui attestent de la contribution de la psychologie à l’acouphène et l’hyperacousie, on prétend qu’un médecin comportementaliste affirmerait que « acouphènes et hyperacousie « c’est psy ».

Si ce médecin dit ça, il ne se fonde pas sur les connaissances acquises sur ces sujets.

Ou alors ce n’est pas ce qu’il dit.

Les connaissances acquises révèlent que ce qui est perçu en cas d’acouphène ou d’hyperacousie est le résultat de modifications des circuits cérébraux des voies auditives. Certaines modifications sont irréversibles en l’état actuel des capacités de la médecine à les réparer. Beaucoup des modifications des circuits cérébraux en cause peuvent être compensées. En lien avec des modérateurs des systèmes nerveux impliqués dans les émotions et la conscience, le fonctionnement de ces modifications peut être régulé. Des méthodes utilisées en médecine comportementale, ou par des techniques instrumentales*, influent sur le fonctionnement de ces systèmes nerveux, ce qui peut changer perception et réaction.

* : stimulation magnétique transcrânienne, stimulation électrique cérébrale profonde ciblée, biofeedback, instillations chimiques dans l’oreille interne, stimulation électrique du nerf auditif par implant, stimulation électrique du nerf vague par implant de pace-maker avec stimulation sonore conjointe …

L’acouphène un bruit insignifiant ?!!

Un médecin comportementaliste qui dirait que l’acouphène est un bruit ferait au minimum un abus de langage. L’acouphène n’est pas un bruit. C’est peut-être une des raisons qui peut faire que l’attention est captée par cette perception auditive alors qu’il n’y a pas de production sonore qui la génère.

Ce qui est insignifiant c’est la mesure indirecte qui est faite des acouphènes. Les ORL disent que les acouphènes sont tant de décibels « au-dessus du seuil auditif ». Et les évaluations que les ORL font rapportent des chiffres peu élevés.

N’est pas insignifiant ce qui est ressenti par la personne qui souffre de la perception des acouphènes. Et ce que ça signifie pour cette personne est hautement impliqué dans la sévérité du trouble qu’est l’intolérance à l’acouphène.

En raison de ce qui précède, il est hautement improbable qu’un médecin comportementaliste ait pu dire que l’acouphène d’une personne qui ne tolère pas cette manifestation auditive est « insignifiant ».

Ce qui est significatif, par contre, c’est que la personne (qui a compris que ce médecin ait qualifié l’acouphène d’insignifiant) accorde une attention majeure à la signification qu’elle estime qu’on accorde ou pas à l’acouphène … Un piège dans sa façon de penser ?

Une exhortation permanente à s’exposer au bruit auprès des personnes souffrant d’hyperacousie ?

Les personnes qui souffrent d’hyperacousie sont dans une détresse très importante. Elles sont confrontées à un réflexe défensif incontrôlable à l’égard de certains bruits en particulier, des bruits soudains, des bruits forts et parfois de tout bruit. Proposer comme solution de s’exposer sans précaution serait une absurdité pour deux raisons au moins : les personnes concernées ne le peuvent souvent pas et certains bruits sont dangereux pour tout le monde. Il est donc peu vraisemblable qu’un médecin comportementaliste ait invité une personne souffrant d’hypersensibilité auditive « à aller en discothèque, à assister à des concerts, à faire des travaux » sans précaution.

Il est exact, par contre, que la démarche comportementale peut aider des personnes souffrant d’hyperacousie et d’intolérance à l’acouphène à retrouver la capacité à retourner en discothèque, à des concerts de musique amplifiée, à des Rave-Parties, à faire des travaux bruyants, à pratiquer la moto, à fréquenter des chantiers, des cours d’écoles, des nurseries, des fêtes foraines, des feux d’artifice, … avec ou sans protection en fonction du risque auditif de ces diverses situations.

TCC avec un thérapeute versus bibliothérapie TCC

Quelqu’un a écrit : « On peut obtenir d’encore meilleurs résultats en s’achetant 3 ou 4 livres de développement personnel (« aide-toi et ton corps t’aidera » par exemple) car on peut les lire dans les moments où l’on est le plus réceptif sans subir les contraintes temporelles de rendez-vous chez le psychologue qui doit s’entretenir avec un nombre donné de patients dans sa journée. »

Et bien oui : si « on » est satisfait de cette démarche, tant mieux ! C’est d’ailleurs pourquoi des thérapeutes écrivent ces livres.

Il arrive aussi que « on » ne soit pas disposé à choisir cette proposition de bibliothérapie ou qu’elle ne lui apporte pas ce que ce « on » cherche.

Il est possible que le « quelqu’un » qui écrit à la place de « on » ne détienne pas la vérité universelle. Et il arrive à ce type de « quelqu’un » de faire, en toute bonne foi, ce qu’il croît être les recommandations qu’il a déduites de ses lectures ou de ce qu’il a entendu, des choses qui s’avèreront nuisibles. Et ce « quelqu’un » pourrait se répandre en critiques des recommandations alors qu’il ne fait qu’évoquer ce qu’il en a compris. Dommage.

Guérir …

Guérir. Résultat parfait de l’action de la médecine.

Soigner. Action de la médecine. Action qui conduit de moins en moins souvent à guérir, de mieux en mieux à « vivre avec », et aussi, de plus en plus, à vivre au mieux, avec ou sans maladie ou symptôme.

Alors oui, on attend encore, comme un miracle, que la médecine offre de « vraies thérapies », des traitements qui « guérissent réellement ». Et l’acte de foi paie parfois.
La médecine comportementale ne fait pas dans le miracle. Elle fait dans la médecine basée sur les preuves.

Le rôle des proches

Face à l ‘acouphène et l’hyperacousie, face à la douleur chronique, face à tout symptôme ou situation chronique, les proches ont tendance à « oublier » que « ça ne va pas ». Et ça signifie surtout que pour les proches la personne qui souffre est d’abord une personne.

Mais voilà : la personne qui souffre a tendance à penser qu’elle est d’abord « qui souffre » avant de penser qu’elle est « une personne ». Et elle voudrait que les proches fassent de même. Ne voyant pas d’issue et voulant rester dans une logique de recherche de guérison, la personne en souffrance attend des autres la confirmation du bien-fondé de la recherche de guérison et de l’absence de perspective en ce sens. Comme les proches ne sont pas intéressés par cette approche déprimante, angoissante, insoutenable … ils ne s’y intéressent pas voire la rejettent.

Alors, effectivement, lorsque la médecine comportementale propose une approche de la personne plutôt que de la « qui souffre », les proches préfèrent ça. Ce n’est pas une raison pour nier « qui souffre ». Au contraire.

La médecine comportementale propose de prendre en compte « la personne » et « qui souffre » : les deux. Et les proches ont un rôle capital à jouer pour aider la personne qui souffre à continuer d’être « la personne » tout en étant « la personne qui souffre ».

Seulement voilà, pour que ça marche, il est nécessaire de voir s’il est possible d’envisager qu’on peut ne pas guérir et, dès lors, avoir à avancer dans la vie avec, au-delà, malgré ce qui « ne va pas ». C’est un vrai défi pour trouver le sens qu’on veut donner à sa vie, pour soi, avec et pour ses proches.

L’acouphène, l’hyperacousie, … maladie ? Handicap ?

Le temps d’apprivoiser sa réaction à l’acouphène ou son hyperacousie, on vit un handicap. Donc permettre aux personnes concernées de continuer de travailler en aménageant les conditions de travail est judicieux. Ce n’est pas un handicap définitif.

L’acouphène n’est pas une maladie : « Tout ce qui est compatible avec la vie est la santé ; tout ce qui est incompatible avec la durée de la vie et fait souffrir est maladie » (Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales). L’acouphène est un symptôme. L’intolérance à l’acouphène est maladie. C’est l’intolérance qui fait souffrir. On peut guérir de cette intolérance et la médecine comportementale favorise ce processus.

L’hyperacousie est une pathologie. Car l’intolérance à certains bruits fait souffrir en ce cas. Cette pathologie est reconnue sous le vocable d’ « intolérance au bruit » dans la grille d’évaluation de Wood utilisée par les médecins pour évaluer le degré d’incapacité d’une polypathologie invalidante (PPI). Non seulement il est justifié, dans la phase aigüe de la pathologie, de ne pas soumettre, en milieu professionnel, aux bruits dérangeants de manière soutenue et répétée la personne intolérante (parfois par aménagement du poste de travail), il serait contre-productif de ne pas tenir compte de cette souffrance en famille et dans les relations sociales. Cet état est transitoire.

L’approche comportementale accélère la guérison. La guérison n’est parfois pas possible lorsqu’une autre maladie entretient le trouble. Ce n’est pas la situation la plus fréquente. La période nécessaire pour parvenir à la guérison, lorsqu’elle est possible, s’échelonne de quelques semaines à plusieurs années en l’état actuel des prises en charge. Il semble qu’une prise en charge soutenue, voire en hospitalisation, avec une équipe pluridisciplinaire soit nécessaire dans certains cas. Ce type de solution n’est pas proposé en France.

Les proches peuvent jouer un rôle pour accompagner la personne souffrant d’hyperacousie à reconquérir progressivement leur liberté à l’égard du bruit. Leur collaboration avec le comportementaliste est recommandée.

Alors … est-il scandaleux qu’un comportementaliste ne considère pas comme malades ni définitivement handicapées les personnes dès lors qu’elles perçoivent un acouphène ou parce qu’elles deviennent transitoirement intolérantes à certains bruits ?

Un mal contre lequel la médecine est totalement impuissante depuis la nuit des temps … ?

On peut lire sur internet : « Ainsi avec des exercices de respiration, des exercices de relaxation et des mots on parvient à guérir un mal contre lequel la médecine est totalement impuissante depuis la nuit des temps (on ne peut rien y faire, il faut vivre avec). Qui peut croire cela? » et ceci est un « discours qui n’a rien a envier à celui du gourou d’une secte ».

On aspire aux progrès médicaux et on devrait considérer que puisque la médecine a été impuissante « depuis la nuit des temps », elle le restera ?

Le progrès médical a plusieurs visages.

Chirurgie, médicaments, technologie aident, guérissent parfois.

La médecine comportementale propose une option pour la santé qu’on souffre ou pas : nous pouvons choisir les comportements qui sont des trésors de vitalité en toutes circonstances de vie. Et ça, on le sait depuis la nuit des temps. C’est aussi pourquoi la médecine comportementale puise autant dans les connaissances scientifiques les plus avant-gardistes et dans les ressources intrinsèques à l’humanité découvertes par nos ancêtres au fil des millénaires passés.

S’il y a bien un danger sectaire à propos de la souffrance liée à l’intolérance à l’acouphène, à l’hyperacousie et à la misophonie, précisément parce ces affections ont la réputation qu’ on ne peut rien y faire, c’est parmi les « négationnistes » des données scientifiques qu’on le trouve : aussi bien ceux qui ne veulent pas admettre qu’un soulagement est possible que parmi ceux qui vendent des médicaments parfois sans intérêt prouvé scientifiquement ou pire dont il est prouvé qu’ils sont plus dangereux que bénéfiques.

 

Dr. Philippe Peignard